La presse est une source précieuse en généalogie qui nous éclaire sur le destin parfois tragique de nos ancêtres. C’est ce que nous allons découvrir avec la famille GUIROLLET.
André GUIROLLET, fils unique
André GUIROLLET naît le 11 janvier 1857 à Larçay, canton de Tours-sud, en Indre-et-Loire. Il est le seul enfant d’André Louis GUIROLLÉ et de Jeanne PERRUCHOT.
À une époque où les familles sont encore nombreuses, cela peut surprendre. Nous allons en découvrir les raisons en consultant différents documents d’archives. L’état civil, les recensements de population, les actes notariés, les successions… nous éclairent sur la vie de nos ancêtres. Parcourir la presse nous permet de les côtoyer dans leur quotidien.
Mais faisons connaissance avec la famille.
Ses parents
André Louis GUIROLLÉ et Jeanne PERRUCHOT se marient le 1ᵉʳ juillet 1856 à Saint-Avertin, commune limitrophe de Larçay. Ils sont, d’ailleurs, natifs tous les deux de Saint-Avertin.
En 1856, Jeanne PERRUCHOT, alors âgée de vingt-six ans, habite chez ses parents avec son frère Avertin, aux Pierres-Plates à Saint-Avertin.
Quant à André GUIROLLÉ, il est alors âgé de trente et un ans. Il est domestique dans une commune voisine, à Chambray, au lieu-dit La Galanderie, chez Charles COSSON. Ce dernier est un cultivateur de cinquante-neuf ans, marié à Rosalie MAURICE. André a probablement eu cette place par connaissance. En effet, sa sœur, Marie GUIROLLET, a épousé en 1854, Pierre Alexandre COSSON, le neveu de Charles.
André et Jeanne ont respectivement trente-deux ans et vingt-sept ans lorsque leur fils André vient au monde à Larçay.
Pourquoi à Larçay ? Peut-être y sont-ils en place à ce moment-là ? Ou bien résident-ils temporairement dans la famille d’André ? En effet, on dénombre quelques GIROLET / GUIROLLET à Larçay à cette époque. Quoi qu’il en soit, en janvier 1857, André est vigneron, domicilié avec sa femme Jeanne à Larçay, au lieu-dit Bordebure.
Leur vie de famille
En revanche, en 1861, André GUIROLLÉ et Jeanne PERRUCHOT ont quitté Larçay. Ils sont domiciliés désormais à Saint-Avertin, au lieu-dit Les Sicotées avec leur fils André, alors âgé de cinq ans.
En 1864, la famille habite toujours à Saint-Avertin, mais au lieu-dit Le Moulin à Vent. André Louis y exerce toujours la profession de vigneron.
Ils y sont propriétaires :
- D’une petite maison composée de deux chambres au rez-de-chaussée, un four dans l’une d’elles, un cellier, un toit à porcs, à côté une écurie et un grenier sur le tout.
- D’une pièce de terre de 65 ares et 95 centiares au lieu-dit du Moulin à Vent à Saint-Avertin, sur laquelle sont construits les bâtiments (dont le rendement est évalué à 90 francs).
La maison et les terres seront évaluées au jour de la succession de Jeanne à 900 francs.
Ils possèdent une vache (valeur 100 francs) et un porc (valeur 12 francs).
Peut-être ont-ils acheté cette maison grâce à l’argent prêté par les parents de Jeanne, Avertin PERRUCHOT et Jeanne BARON et par le frère d’André, François GUIROLLÉ. Soit respectivement les sommes de 800 et 900 francs.
Au moment de son mariage, Jeanne avait également reçu une somme d’argent de ses parents. Elle compensait la somme versée pour le remplacement militaire de son frère.
Cette somme acquise, ne fera pas l’objet de remboursement. Si elle est équivalente à celle payée à l’État pour le remplacement d’Avertin, elle doit être de 2 000 francs.
Le jeune couple commençait donc leur vie commune, confortablement, avec un pécule, une maison, des vignes, une vache, un porc… Ils avaient eu la joie d’avoir un fils en bonne santé…
Un décès brutal
En 1866, André, père et fils habitent toujours au Moulin à Vent. Mais, le père de famille est remarié à Anne SERRAULT.
En effet, Jeanne PERRUCHOT est décédée le 8 juin 1864 à Saint-Avertin, âgée seulement de trente-quatre ans.
Elle est décédée le matin, à 8 h 30, face au fourneau de la commune de Saint-Avertin.
Son décès est déclaré à la mairie par son beau-père André GUIROLET et son frère Avertin PERRUCHOT. Ils fournissent le certificat du médecin chargé de constater les décès de la commune de Saint-Avertin.
Est-elle décédée à la suite d’un accident lié au fourneau de la commune ?
Lorsque la presse nous éclaire sur l’accident
Un article paru le jeudi 23 juin 1864 dans « Le Pays, Journal de l’Empire » [3] va donner un tout autre éclairage à ce décès qui est bien accidentel.
Ce journal reprend des nouvelles parues dans les journaux régionaux. il relate un fait divers paru dans « La France Centrale de Blois, journal des intérêts provinciaux », qui couvre alors le Loir-et-Cher, mais aussi l’Indre-et-Loire.
On peut y lire :
« La femme Guirollet, du Moulin à Vent, commune de Saint-Avertin, avait attaché autour de son bras la corde avec laquelle elle conduisait sa vache aux champs. En arrivant à un chemin rural, la vache effrayée, prit sa course, entraînant après elle la femme Guirollet. Un vigneron accourut aux cris poussés par la victime. Lorsqu’il arriva sur le chemin, la vache s’était arrêtée d’elle-même, après avoir parcouru une distance de 150 mètres environ. Il s’empressa de détacher la corde attachée au bras de lafemme Guirollet, mais il reconnut bientôt que cette malheureuse, dont le corps dépouillé en partie de ses vêtements, était tout meurtri, défiguré et couvert de sang, avait rendu le dernier soupir. »
Même si son prénom n’est pas précisé, il n’y a pas de doute, il s’agit bien de Jeanne PERRUCHOT, la femme d’André GUIROLLET, demeurant au lieu-dit Moulin à vent à St-Avertin. La vache est, du reste, mentionnée, dans la succession de Jeanne pour une valeur de 100 francs. L’histoire ne dit toutefois pas ce qu’André a fait de cette vache qui a causé la mort de sa femme.
[3] Le Pays, Journal de l’Empire, au départ nommé Le Pays, journal des Volontés de la France, est fondé à la fin de l’année 1848, avec pour vocation initiale de servir de tribune aux départements. Il reprend des nouvelles et faits divers parus dans les journaux régionaux. Le journal devient sous l’Empire le soutien inconditionnel du régime de Napoléon III.
André et Nanette
Nous le voyons avec cet exemple, la presse permet d’enrichir notre généalogie et surtout de mieux comprendre le destin de nos ancêtres.
Mais reprenons notre histoire.
Leur mariage
André Louis est seul avec un enfant en bas-âge. Il se remarie le 26 avril 1865 à Chambray avec Anne SERRAULT dite Nanette qui est âgée de trente ans.
Ils n’auront pas d’enfants.
Un contrat de mariage est établi le 2 avril 1865 par Maître Bertin à Saint-Avertin. Ils se marient sous le régime de la communauté réduite aux acquêts.
Elle se composera des acquisitions et des revenus générés par leurs biens respectifs ou communs. Mais ils restent responsables des dettes contractées avant leur mariage et propriétaires des biens meubles et immeubles acquis avant leur mariage.
- André Louis, amène son linge et sa garde-robe.
A à la suite de la succession de son épouse Jeanne PERRUCHOT, les droits issus de son premier mariage feront l’objet d’une liquidation entre André et son fils mineur.
Il apporte la somme de 150 francs qui lui est due pour travaux dans des vignes chez divers particuliers.
Mais, il a surtout des dettes à rembourser : 800 francs prêtés par ses beaux-parents avec les intérêts, et 900 francs prêtés par son frère. - La dot d’Anne est constituée de ses vêtements, linges, hardes et dorures à son usage personnel.
Elle apporte également la somme de 60 francs qui lui est due pour quatre mois de gages. Et la somme de 85 francs qu’elle possède par-devers elle en argent comptant. Ainsi qu’un buffet en chêne estimé à 20 francs.
Et enfin, une somme de 220 francs, placée sur un livret de Caisse d’épargne et de prévoyance de la ville de Tours, dont les intérêts calculés jusqu’au jour du mariage sont évalués à 20 francs.Ses apports personnels sont donc de 405 francs.
Elle est aussi propriétaire d’une maison située au Tertre à Véretz. Ainsi que 19 ares 79 centiares de terres, vignes, jardin et cour. Biens qu’elle avait acquis de M PERRIGAULT en 1859 pour la somme de 800 francs payés comptant. (Acte passé devant Maître Dabilly, notaire à Montlouis.)
Vignerons à Saint-Avertin
Le couple se fixe au lieu-dit Les Pierres Plates pendant quelques années ils y sont recensés en 1872 et 1876.
André fils vit avec eux jusqu’à son départ pour l’armée.
D’après les recensements de population de 1881, 1886, 1891, 1896 et 1901, André Louis et Nanette résident à La Ramée. Ils sont désormais vignerons, propriétaires exploitants.
Après le décès d’André Louis survenu le 7 mai 1904 à Saint-Avertin, Nanette reste à La Ramée. Mais c’est à Tours, que Nanette décède le 18 mars 1918, en son domicile. Elle réside Boulevard Preuilly au n°10, à l’hospice des Petites Sœurs des Pauvres.
Quant à André fils, il semble, d’après les témoignages, qu’il ne se soit jamais remis de la perte de sa mère. Il se mariera jeune. Puis se séparera de sa femme après le décès de ses filles, la perte de ses vignes atteintes du phylloxéra… et il partira aux Amériques sans plus donner de nouvelles à sa famille.
Là aussi, la presse nous aidera à retrouver sa trace, mais ceci est une autre histoire…
Sources :
Archives départementales d’Indre-et-Loire : état civil, recensements de population, successions, archives notariales, archives militaires, presse.
Quelques cotes consultées :
- Inventaire après décès – AD37 3Q 8095 et succession 3Q 8917 de Jeanne PERRUCHOT.
- Archives militaires, listes de tirage au sort cantonales, du contingent départemental et des exonérés de la classe 1856 – AD 37 1R118 – 1R159 – 1R181.
- Contrat de mariage – AD37 – 3E58/351